La solitude, pour ne plus être seul...
« La grandeur s’atteint par le contact avec la grandeur, comme une flamme par le contact avec une flamme. Je prétends qu’elle s’attrape comme
une maladie. La grandeur, c’est Dieu. J’ai dit que le contact avec Dieu ne s’effectue que par la solitude. (…) Prenez garde que cette solitude vous dépouillera de tout et que le cercle
magique que vous tracerez autour de vous se multipliera en cercles toujours plus grands ; on s’écartera de vous avec tremblement. La rétractation ne servirait de rien, vous mourrez comme un
scorpion dans un cercle de feu ; vous mourrez parce que vous étant approchés de la grandeur et n’ayant pas eu la persévérance et l’audace de vous y fondre, vous n’en êtes que contaminés.
Cela suffit pour effrayer les hommes. Vous êtes à part, vous n’êtes pas en Dieu. Vous n’êtes plus du monde. Il faut demander avec tremblement la solitude et la familiarité avec
Dieu. »
« Une vie dans laquelle il n’y a pas de solitude est une vie sans force et sans intérêt. En somme, la solitude est le lieu le moins solitaire qui soit, puisque la vitalité de notre être la peuple immédiatement, si bien qu’on peut dire qu’une vie dans laquelle il n’y a pas de solitude est la plus solitaire au monde. C’est dans la solitude que les idées prennent possession de nous. Il faudrait se figurer les idées non comme passives et capables d’être examinées puis laissées de côté, mais comme très actives et nous épiant, prêtes à tout moment à bondir sur nous et nous asservir à elles. »
Julien Green, On est si sérieux quand on a 19 ans.