De la petitesse de l’enfant à la petitesse du Crucifié (III)
Je crois qu’il est très important de bien distinguer ces deux petitesses. Et c’est vraiment en théologie mystique
qu’on peut préciser les deux. En théologie scientifique, on précise simplement que l’intelligence doit se taire pour laisser l’amour passer devant lui. Oui, mais l’intelligence se tait de deux
façons différentes : elle se tait dans une attente de la promesse, et elle se tait en mourant à elle-même, en disparaissant, en attendant que tout vienne de Dieu (la Résurrection). C’est
très important dans notre vie de bien distinguer les deux parce que, si l’on reste dans la petitesse de l’enfant, dans l’attente de la promesse, et que cette promesse ne se réalise jamais, on
tombe dans le désespoir. Et on voit cela, on voit des personnes qui ont vraiment vécu une certaine petitesse évangélique, très belle mais encore trop humaine : il y avait chez elles le désir
de la réussite, de la transformation. Jésus veut qu’on aille plus loin, qu’on accepte de mourir à soi-même. Et la mort à soi-même réclame qu’on s’en remette totalement à la Miséricorde
divine.
Si sœur Faustine, cette petite sainte polonaise, insiste tellement sur la miséricorde, et si elle a insisté pour que cette miséricorde se manifeste dans la liturgie par un jour consacré à cela, c’est parce que nous vivons actuellement non pas une petitesse joyeuse en attendant la victoire, mais la petitesse de la Croix. Et cette petitesse de la Croix réclame de nous la remise totale de nous-mêmes à la Providence divine, à la Miséricorde divine. C’est, je crois, très important. Et cela nous fait saisir pourquoi Jésus ne répond pas à cette demande de l’humanité : « Sauve-toi toi-même si tu es le fils de Dieu, et descends de la croix » (Mt 27, 40. Cf Lc 23,35). On veut connaître pas son intelligence pourquoi Dieu agit ainsi. Et Jésus ne répond pas. Si Jésus ne répons pas, c’est parce qu’il veut que, dans un abandon toujours plus absolu, on attende tout de sa miséricorde et on lui abandonne tout.
On ne réclame pas que Dieu rétablisse ce qui était avant, parce que Dieu ne fait jamais cela, il ne rétablit pas ce qui était avant. C’est une très grande erreur, de croire que la grâce chrétienne est tout simplement un retour à la grâce première. Dieu ne nous fait pas retourner en arrière, il nous fait toujours aller plus loin : Duc in altum ! Il se sert donc de nos faiblesses, de nos misères, pour donner plus, et non pas du tout pour nous rétablir dans une perfection première ; il veut qu’on abandonne cela et qu’on lui fasse une totale confiance, la confiance de l’homme crucifié, la confiance de celui qui est considéré par les hommes comme un séducteur, la confiance de celui qui est rejeté.
MD Philippe. Sur la petitesse.
Fr Greg 26/06/2011 22:43
V 26/06/2011 00:10